L’eau virtuelle / Virtuelles Wasser

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Version Allemande: Virtuelles Wasser. Faszination Wissen

https://www.youtube.com/watch?v=yKO0JDH4Iyc

Synopsis/contenu du film

Aujourd’hui, les Allemands consomment en moyenne 120 litres d’eau par jour, un chiffre qui monte à 150 l en ce qui concerne la France. Cependant il ne s’agit là que de la consommation directe, la consommation réelle moyenne d’un français étant de 4900 l par personne et par jour. Ce documentaire traite de l’eau virtuelle, l’eau utilisée pour fabriquer tout ce que nous consommons. A titre d’exemple, un tee-shirt demande 2500 l et un kilo de bœuf 15,400 l. Cette eau virtuelle, incorporée dans les produits, est aussi appelée par les scientifiques « l’empreinte eau ».

Cette empreinte eau comprend toute l’eau utilisée pour toutes les étapes de fabrication d’un produit, dans le cas du bœuf ce sera : l’eau pour boire, nettoyer l’étable ou encore pour faire pousser sa nourriture, en général du soja qui provient du brésil. Ce soja représente à lui seul 98% de l’eau utilisée pour la production de cette viande.

La majeure partie de notre consommation en eau a lieu à l’international: en France celle-ci s’élève à plus de la moitié de la consommation totale tandis que pour l’Allemagne ce chiffre se rapproche des deux tiers de leur consommation totale. Très souvent cette consommation d’eau a lieu dans des pays où la pression sur les ressources en eau sont déjà fortes. En définitive nous réalisons que nos modes de vie et notamment nos choix de consommation vont impacter les ressources en eaux de la planète.

L’eau virtuelle est divisée en trois catégories : eau verte (l’eau de pluie), l’eau bleu (les cours d’eau, les lacs et les nappes), et enfin l’eau grise (les effluents, rejets ou pollutions). Cependant il est important de noter que l’empreinte eau (quantité d’eau virtuelle totale) pour un même produit peut varier selon le lieu de production. La surexploitation de l’eau bleue induit parfois un épuisement de la ressource, selon la situation géographique et le type de culture. La mer d’Aral en est un bon exemple puisque cette dernière a quasiment disparu en 10 ans à cause de l’exploitation du coton irrigué. L’eau grise quant à elle pose des problèmes de pollution du milieu.

A l’heure actuelle la solution principale pour gérer ces problèmes revient à modifier nos modes de consommation. Acheter des produits alimentaires ou non alimentaires dont la fabrication est bio, sans pesticides ou produits chimiques, qui ne produisent pas d'eau grise, mais n'a cependant peu d’impact sur l’eau verte ou bleue utilisée. Concernant l’alimentation, diminuer nos consommations de viandes ou à défaut choisir du porc ou de la volaille, réduit la consommation indirecte en eau. Une application permet de scanner les codes-barres des produits les plus courants et d'indiquer leur empreinte eau.

Analyse critique

Ce documentaire est très intéressant d’un point de vu sociétal. En effet il aborde une problématique qui nous concerne tous sans que nous soyons forcément au courant de l’impact que peuvent avoir nos modes de vie et de consommation sur les ressources en eau. Du fait qu’il s’agit d’un documentaire Arte, le parallèle entre les consommations des français et des allemands est mis en avant. Cette comparaison prend tout son sens à travers l’exemple de nos consommations de viande et permet de comprendre l’impact du type de viande consommé (bœuf en France et porc en Allemagne). Une différence qui, par effet « domino », impacte plus ou moins les pays producteurs d’où sont importés les aliments pour animaux (Brésil pour le soja).

Au début du documentaire la parole est donnée à de jeunes étudiantes allemandes qui sont directement confrontées à cette problématique. Ces personnes sont sensibilisées au problème puisqu’elles sont déjà dans une dynamique de gestion raisonnée de l’eau à leur échelle. La parole aurait aussi pu être donnée à des personnes qui ne sont pas sensibilisées à ce genre de problème et dont la situation sociale ne permet pas de considérer l’économie d’eau comme une priorité. Cela pourrait être la cas également des agriculteurs concernés par "l’amont" de la production et qui se trouvent dans des pays où l’agriculture représente 80% de leur source de revenus. Le documentaire est de ce fait très centré sur les occidentaux et ne replace pas la problématique à une échelle plus large.

La partie plus scientifique de ce documentaire est relativement courte, et comprend notamment l’intervention, à deux reprises, du professeur Arjen Hoekstra. Celui-ci pose les bases du concept qu’est l’eau virtuelle, ou l’empreinte eau, et l'explique de manière claire et adaptée à la vulgarisation. A l’heure actuelle le véritable moyen de diminuer l’empreinte eau est de changer nos façons de consommer. Des systèmes pour permettre au plus grand nombre d’avoir accès à ces informations commencent à se mettre en place: une application indique l'empreinte eau des produits les plus courants mais ne peut prendre en compte les différences d'origine et la composition d'eau vertes/bleues/grises qui ont été utilisées. Cette technologie est donc pour le moment peu satisfaisante: on ne peut comparer en effet des productions pluviales (typiquement le soja brésilien ou l'huile de palme indonésienne) qui consomment donc de l'eau verte qui de toute façon aurait été consommée par tout autre couverture végétale, avec des productions irriguées dans des régions où les ressources sont sévèrement surexploitées (typiquement les produits maraîchers du sud marocain ou du sud-est de l'Espagne). Cette réalité hydrologique et géographique est extrêmement complexe à prendre en compte et demande une information difficile à rassembler.

Xenius est une émission qui pêche souvent par son optimisme scientifique sans nuance. Le documentaire nous apprend ainsi que "pour obtenir des rendements aussi élevés qu'en Europe les agriculteurs des pays pauvres manquent souvent de formation et de moyens techniques. Avec ces deux outils le volume des récoltes pourrait être multiplié par 10 dans de nombreuses régions d'Afrique". Ce genre d'assertion ne permet pas de faire progresser la compréhension des choses et peut au contraire renforcer des clichés simplistes. De même le reportage, à travers la voix d'un chercheur allemand, décrit le système australien d'allocation de l'eau: "En Australie l'eau destinée à l'irrigation est vendue aux enchères; le plus offrant qui a davantage l'eau doit avoir réfléchi à la récolte qui peut en tirer ce système donne un prix à l'eau ; comme l'eau à un prix on ne l'utilise pas à tort et à travers et on ne la gaspille pas". La célébration sans nuance des marchés de l'australien ne permet pas non plus le développement d'une pensée critique, même s'il faut reconnaître que le format court du documentaire ne permet pas de traiter de tels sujets de manière approfondie.

Le documentaire se termine sur la remise en cause des politiques publics et des systèmes de mondialisation, d’échanges internationaux et de décentralisation. Il appelle, toujours à travers la voix du géographe allemand, les décideurs à prendre des mesures ("ce sont aux responsables politiques de faire leur devoir, c'est pour cela que nous les avons élus") pour réguler les échanges de l'eau. Ce genre de recommandations incantatoires et naïve, et les déclarations sans nuance qui émaillent le documentaire, nuisent à sa pertinence et à sa crédibilité. Néanmoins, s’adressant à un large public, il constitue une bonne conscientisation quant aux relations entre la consommation en eau et la production de denrées alimentaires ou industrielles. Par cette prise de conscience, il peut contribuer à susciter des comportements écocoresponsables, peut-être facilités demain par des étiquetages ou des applications pour téléphone plus élaborées qu'elles ne le sont aujourd'hui.

(Contributions de Lucas Mansanti)

Références bibliographiques

https://waterfootprint.org/media/downloads/TheWaterFootprintAssessmentManual_2.pdf

https://www.banquemondiale.org/fr/topic/agriculture/overview

https://www.waterfootprint.org/en/resources/interactive-tools/product-gallery/

https://waterfootprint.org/media/downloads/WWF-France-2012-Empreinte-Eau_1.pdf

 

 

Additional Info

  • Director: Anja Hentschel, Monika Eder
  • Producer: Anne Steinkamp, Janina Dgos ARTE-Xenius
  • Language: French, German
  • Year: 2014
  • Duration (min): 24
  • Theme: Water scarcity, Irrigation & agricultural water management, Water governance, Sustainability, Water and community
  • Access: Free
  • Country: Global, Germany, France
  • Technical quality (star): Technical quality (star)
  • Academic interest (star): Academic interest (star)
  • Societal interest (star): Societal interest (star)
  • Technical quality: 2.5
  • Academic quality: 3
  • Social interest: 4