Iraq’s dying rivers

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Synopsis

At the confluence of the Tigris and Euphrates rivers, Iraq is home to one of the largest inland deltas in the world, the Mesopotamian Marshes. At the outlet of this Garden of Eden, in the region of Basra, water flows through a single navigable channel called the Shatt-el-Arab. For thousands of years, this resource has fed local populations. Fishermen sold their fish on the market of Baghdad. This fragile ecosystem has considerably deteriorated in recent decades. The rivers, in fact, have their source in Turkey and are fed by Syrian and Iranian tributaries. Each dam built in one of these countries reduces the flow of Iraqi rivers. Internally, the marshes suffered particularly from the actions of Saddam Hussein in the 1970s, who dried them out in retaliation. The situation has improved somewhat today, but the area is now suffering from pollution and declining water levels. The consequent disappearance of fish is pushing fishermen to venture into the waters of the Persian Gulf, risking confrontations with their Iranian and Kuwaiti neighbors, as well as with the Iraqi police.

The documentary looks at how traditional fishermen survive in this changing environment and the challenges they face on a daily basis. In particular, it gives voice to a couple living in the marshes, as well as fishermen operating on the Shatt-el-Arab or at its mouth.

Critical analysis

The tone of the press articles evoking the future of the marshes is changing. After disappearing under Saddam Hussein, hope returned in the 2000s after the water had recovered more than half of its original area. Since then, and despite some alarmist voices (Cockburn, 2009), the press has been generally optimistic. This trend was confirmed by the inscription of the site as a UNESCO World Heritage Site in 2016 and the development of local initiatives in favor of tourism (AFP, 2019; Van der Stockt, 2016). The present documentary feeds into a more recent pessimistic stance that, since 2018 or 2019, insists on the deterioration of the quality of the aquatic environments of the region and their consequences on humans and their environment.

Little data is available on the background of the film. It was posted online in 2019 and appears to have been made in 2018 or 2019, with no further indication. It was broadcast on the Al Jazeera English channel.

This documentary reports the difficulties encountered by fishermen in the Marshes as well as in the Shatt-el-Arab or the river mouth. The problems noted are real, be it the drop in water levels (CCFD - Terre Solidaire, 2022), pollution from industries, the bad practices of illegal fishermen (al-Omran, 2020), or border disputes in which fishermen are regularly arrested and fined by the police forces of the three countries (AFP, 2021a). Other threats to this fragile balance are not addressed, such as the proliferation of the "Nile flower", a highly invasive and damaging species (AFP, 2020) and the presence of Islamic State fighters in the region (Vivienne, 2022).

The documentary makes no attempt to take a hydrological or biological approach to the issue. It is focused on understanding the sociological consequences of this drama. As such, it is interesting for the simplicity of the way it looks at the situation. In particular, it gives the floor to an elderly fisherman couple, whose Kalashnikov is prominently displayed on the boat, and to a young child who is passionate about fishing.

However, we regret that the explanations are one-sided. The point of view of the public authorities is not presented. Originally, the State seemed intent on limiting the expansion of tourism in the marshes so as not to affect their biological balance (France 24, 2019). Its current lack of interest, illustrated by the direct discharge of sewage into the environment in the absence of a treatment plant, however, contributes to worsening the situation (Indhar, 2021).

In addition, the director has chosen not to dwell on the causes of the problems faced by the various actors. These are numerous: internal political chaos for the past thirty years, retention of water upstream by Turkish, Syrian, Iranian (to a lesser extent) and Iraqi dams, urban and agricultural pollution upstream, record drought that led to a 80 km intrusion of salt water into the Shatt-el-Arab in 2018, or the lack of sediment in the water replenishing the marshes that harms the growth of fish (CCFD - Terre solidaire, 2019). The role of Turkey, which is suspected of using water as a geopolitical weapon and accentuates the pressure through its intensive agricultural policy (AFP, 2021b), is not discussed.

(with contributions from Alexis Baron)

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Synopsis/contenu du film

A la confluence du Tigre et de l’Euphrate, l’Irak abrite l’un des plus grands deltas intérieurs au monde, les marais de Mésopotamie. A l’exutoire de ce jardin d’Eden, dans la région de Bassorah, l’eau emprunte une unique voie navigable appelée Chatt-el-Arab. Durant des millénaires, cette ressource a alimenté les populations locales. Les pêcheurs vendaient alors leurs poissons sur le marché de Bagdad. Ce fragile écosystème s’est considérablement dégradé ces dernières décennies. Les fleuves, en effet, prennent leur source en Turquie et sont alimentés par des affluents syriens et iraniens. Chaque barrage construit dans l’un de ces pays diminue le débit des cours d’eau irakiens. En interne, les marais ont particulièrement souffert de l’action de Saddam Hussein dans les années 1970, qui les a asséchés par mesure de représailles. La situation s’est quelque peu améliorée aujourd’hui, mais la région souffre désormais de la pollution et de la baisse des niveaux d’eau. La disparition conséquente des poissons pousse les pêcheurs à s’aventurer dans les eaux du Golfe Persique, risquant des confrontations avec leurs voisins iraniens et koweitiens, ainsi qu’avec la police irakienne.

Le documentaire s’intéresse à la manière dont les pécheurs traditionnels survivent dans cet environnement changeant et aux défis qu’ils ont à relever au quotidien. Il donne en particulier la parole à un couple vivant dans les marais, ainsi qu’à des pêcheurs opérant sur le Chatt-el-Arab ou à son embouchure.

Analyse critique

La tonalité des articles de presse évoquant le devenir des marais est changeante. Disparu sous Saddam Hussein, l’espoir est revenu dans les années 2000 après que l’eau ait retrouvé plus de la moitié de sa surface initiale. Dès lors, et malgré certaines voix alarmistes (Cockburn, 2009), la presse s’est globalement montrée optimiste. Cette tendance a été confirmée par l’inscription du site au patrimoine mondial de l’UNESCO en 2016 et le développement d’initiatives locales en faveur du tourisme (AFP, 2019 ; Van der Stockt, 2016). Le présent documentaire se place dans le courant pessimiste plus récent qui, depuis 2018 ou 2019, insiste sur la détérioration de la qualité des milieux aquatiques de la région et leurs conséquences sur les hommes et leur environnement.

Peu de données sont disponibles sur le contexte du film. Il a été mis en ligne en 2019 et semble avoir été réalisé en 2018 ou 2019, sans indication supplémentaire. Il a été diffusé sur la chaine Al Jazeera English.

Ce documentaire a le mérite de mettre en images un sujet d’actualité régionale. Il rapporte en effet les difficultés que rencontrent les pêcheurs tant dans les Marais qu’au niveau du Chatt-el-Arab ou de l’embouchure. Les problèmes relevés sont réels, qu’il s’agisse de la baisse du niveau d’eau (CCFD – Terre Solidaire, 2022), de la pollution issue des industries ou des mauvaises pratiques des pêcheurs illégaux (al-Omran, 2020), ou encore des différends frontaliers à l’occasion desquels les pêcheurs se voient régulièrement arrêtés et sanctionnés financièrement par les forces de police des trois pays (AFP, 2021a). D’autres menaces pesant sur ce fragile équilibre ne sont pas abordées, comme la prolifération de la « fleur du Nil », espèce hautement invasive et dommageable (AFP, 2020) et la présence de combattants de l’Etat islamique dans la région (Vivienne, 2022).

Le documentaire ne cherche aucunement à adopter une approche hydrologique ou biologique de la problématique. Il est résolument axé sur l’appréhension des conséquences sociologiques de ce drame. A ce titre, il est intéressant par la simplicité du regard qu’il porte sur la situation. Il donne notamment la parole a un couple de pêcheurs âgés, dont on remarquera la Kalachnikov posée en évidence sur la barque, et à un jeune enfant passionné par le métier.

L’on regrettera toutefois que les explications soient unilatérales. D’une part, le point de vue des autorités publiques n’est pas mentionné. Or, celui-ci gagnerait à être explicité. A l’origine, l’État semblait limiter volontairement l’expansion du tourisme dans les marais pour ne pas ne pas affecter leur équilibre biologique (France 24, 2019). Son désintérêt actuel, illustré par le déversement direct des égouts dans le milieu en l’absence de station d’épuration, contribue cependant à empirer la situation (Indhar, 2021).

En outre, le réalisateur a fait le choix de ne pas s’étendre sur les causes des maux rencontrés par les différents acteurs. Celles-ci sont pourtant nombreuses : chaos politique interne depuis une trentaine d’années, rétention d’eau en amont par les barrages turcs, syriens, iraniens (dans une moindre mesure) et irakiens, pollutions urbaines et agricoles de l’amont, sécheresse record ayant conduit à une remontée de l’eau salée de 80 km dans le Chatt-el-Arab en 2018, ou encore remplissage des marais par de l’eau de pluie pauvre en sédiments nuisant à la croissance des poissons (CCFD – Terre solidaire, 2019). Le rôle de la Turquie, suspectée d’utiliser l’eau comme arme géopolitique et accentuant la pression par sa politique agricole intensive (AFP, 2021b), n'est pas abordé.

(avec la contribution d’Alexis Baron)

 

Bibliographie

AFP. 2019. En Irak, les marais misent sur l’écotourisme pour redevenir jardin d’Eden. Le Point. 24/05/2019. Disponible sur : https://www.lepoint.fr/monde/en-irak-les-marais-misent-sur-l-ecotourisme-pour-redevenir-jardin-d-eden-24-05-2019-2314773_24.php (consulté le 28 février 2022).

AFP. 2020. En Irak, la « fleur du Nil » rue fleuves, poissons et toute une économie. The Times of Israël. 23/06/2020. Disponible sur : https://fr.timesofisrael.com/en-irak-la-fleur-du-nil-tue-fleuves-poissons-et-toute-une-economie/ (consulté le 28 février 2022).

AFP. 2021a. Les pêcheurs irakiens du Chatt-al-Arab pris dans les filets des différends frontaliers. Le Point. 08/12/2021. Disponible sur : https://www.lepoint.fr/monde/les-pecheurs-irakiens-du-chatt-al-arab-pris-dans-les-filets-des-differends-frontaliers-08-12-2021-2455827_24.php (consulté le 28 février 2022).

AFP. 2021b. Syrie : sécheresse et géopolitique menacent les riverains de l’Euphrate. Disponible sur : https://www.geo.fr/geopolitique/syrie-secheresse-et-geopolitique-menacent-les-riverains-de-leuphrate-206068 (consulté le 28 mars 2022).

Al-Omra F. 2020. Pollution et pratiques illicites de pêche entraînent une surmortalité des poissons en Irak. Diyaruna. 17/09/2020. Disponible sur : https://diyaruna.com/fr/articles/cnmi_di/features/2020/09/17/feature-03 (consulté le 28 février 2022).

CCFD – Terre solidaire. 2019. Irak : les marais mésopotamiens vont-ils disparaître ? Disponible sur : https://ccfd-terresolidaire.org/irak-les-marais-mesopotamiens-vont-ils-disparaitre/ (consulté le 28 mars 2022).

CCFD – Terre solidaire. 2022. En Irak, la menace de la faim le long des marais assoiffés. Disponible sur : https://ccfd-terresolidaire.org/en-irak-la-menace-de-la-7209/ (consulté le 28 février 2022).

Cockburn P. 2009. Martyrs of the Iraqi marshes. The Independent. 24/04/2009. Disponible sur : https://www.independent.co.uk/news/world/middle-east/martyrs-of-the-iraqi-marshes-1673421.html (consulté le 03 avril 2022).

France 24. 2019. En Irak, les marais de Mésopotamie comparés au jardin d’Eden. Disponible sur : https://www.france24.com/fr/video/20190522-irak-marais-mesopotamie-compares-jardin-eden (consulté le 03 avril 2022).

Indhar H. 2021. Dans les marais de Mésopotamie coulent… les égouts d’Irak. L’Orient-le Jour. 06/05/2021. Disponible sur : https://www.lorientlejour.com/article/1260801/dans-les-marais-de-mesopotamie-coulent-les-egouts-dirak.html (consulté le 25 mars 2022).

Van der Stockt L. 2016. La vie retrouvée des fragiles marais irakiens. Le Monde. 07/07/2016. Disponible sur : https://www.lemonde.fr/planete/portfolio/2016/07/08/la-vie-retrouvee-des-fragiles-marais-irakiens_4966507_3244.html#DiD7o2LZTpAJ8kF7.99 (consulté le 25 mars 2022).

Vivienne. 2022. Irak : cinq pêcheurs enlevés au nord de Bagdad. Disponible sur : http://french.china.org.cn/foreign/txt/2022-01/17/content_77992938.htm (consulté le 28 février 2022).

 

Additional Info

  • Director: Omayma Naklah and Mohammad Rahahleh
  • Producer: Al Jazeera
  • Language: English
  • Year: 2019
  • Duration (min): 46
  • Theme: Environmental degradation, Climate change, Water quality, pollution, Fisheries, Transboundary waters, Water politics
  • Access: Free
  • Country: Iraq
  • Technical quality (star): Technical quality (star)
  • Academic interest (star): Academic interest (star)
  • Societal interest (star): Societal interest (star)
  • Technical quality: 2.5
  • Academic quality: 1.5
  • Social interest: 4