Côte d'Azur: Catastrophe en terre inondable

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Synopsis/contenu du film

Ce documentaire relate le bilan du déluge meurtrier qui a ravagé les Alpes-Maritimes le soir du 3 octobre 2015, en causant 21 morts, 65 000 sinistrés ainsi qu’une estimation de 600 millions d’euros de dégâts. Deux records enregistrés dans l’histoire de météo France (150 l/m2 en 2 heures à Mandelieu et 175 l/m2 à Cannes) ont créé des rivières en ville et un torrent inondant les routes et maisons. A Biot le niveau de l’eau est monté d’1.50 m dans les maisons.

Une opération d’évacuation des habitants a été organisée par les pompiers et la sécurité civile. Un grand élan de solidarité est né suite à cette tragédie, les habitants se sont soudés pour remettre de l’ordre dans les maisons les plus touchés, tandis que des aides alimentaires et vestimentaires ont été reçues d’autres mairies et villes du pays.

Une enquête est menée pour comprendre scientifiquement ce phénomène, et savoir pourquoi ce dernier n’a pas été prédit par Météo France et aucune alerte inondation n’a été déclenchée. La ville de Biot dispose d’un bâtiment équipé d’un système d’alerte des inondations qui n’a pas été déclenché lors de la crue pour informer la population du danger. Les habitants se posent des questions sur l’entretien et les constructions en amont du Riou, ce cours d’eau qui longe leur immeuble. Des plaintes sont déposées par la population, des opposants politiques et associations pour homicide involontaire. Une étude de faisabilité d’un bassin de rétention daté de 1999 a été évoquée, mais celui-ci n’a jamais été construit. En revanche, la mairie déclare avoir investi des millions d’euros dans l’amélioration des cours d’eau et se réfère au plan de prévention des inondations signé par le préfet en 2003. Dans ce plan, la mairie avait pour responsabilité de réaliser des travaux de prévention des risques inondations dans un délai de 5 ans, et les propriétaires dans les zones à risque de sécuriser les sous-sols avec des portes étanches et des systèmes d’alerte.

Un constat est effectué par des écologistes sur l’hyperurbanisation de la Côte d’Azur. Avec plus de 1,100,000 habitants sur une bande littorale de 15 Km de large, en 30 ans le nombre de construction a triplé dans certaines communes, chaque commune ayant établi son propre plan d’urbanisation sans se soucier de la commune voisine. Les premiers terrains ont été urbanisés dans des zones sans risques, et au fur et à mesure de la pression foncière et immobilière, des terrains potentiellement dangereux ont été construits.

Les inondations dans la plaine d’Antibes ont commencé après la construction du chemin de fer puis de l’autoroute, qui forment deux obstacles artificiels perpendiculaires au cours d’eau. Par ailleurs, le manque d’entretien des rivières a joué un rôle dans la crue meurtrière, les collectivités et les particuliers ayant laissé trop d’arbres et de végétation envahir les cours d’eau. La mairie se justifie de ne pas pouvoir nettoyer les rivières et créer un bassin de rétention car les services de l’état lui imposent la protection des espaces végétalisés.

Suite à l’évènement du 3 Octobre 2015, plusieurs maisons se trouvant dans des quartiers à fort aléa d’inondation ont été murées, d’autres rachetées par l’Etat avec les fonds Barnier. L’état a élargi les zones à risques d’inondation dans toutes les communes, ce qui durcira l’obtention d’un permis de construction pour les habitants, et il a procédé à la fermeture de certains campings situés dans ces zones à risque. Les compagnies d’assurances auraient indemnisé 95% de leur clients.

Un plan de prévention est établi par le syndicat intercommunale de la Siagne et disposera des capteurs de niveaux d’eau qui alerteront les communes en cas de dépassement de seuils d’alerte. Le conseil départemental envisage de créer un établissement public territorial qui regroupera toutes les communes et syndicats de rivières afin de définir une politique unique de l’eau.

Analyse critique

Ce documentaire a été réalisé dans le but de comprendre ce qui s’est passé le soir du 3 octobre 2015, une enquête qui reprend de nombreuses images, parfois prises par les sinistrés eux-mêmes au moment du drame ou des journalises, ainsi qu’une recherche sur le terrain menée une année après.  Les témoignages bouleversants des habitants sont mis en avant, ainsi que leur incompréhension sur le fait que Météo France n’a pas pu prédire une tragédie pareille. Selon les scientifiques, aucun modèle de prévision numérique n'arrive à modéliser et à conceptualiser ces phénomènes très violents et très brefs. En revanche, une méthode d’anticipation des crues soudaines est testée par Météo-France et Iretea pour le compte de Province Alpes Côte d’Azur en utilisant les données d’entrée les lames d’eaux enregistrées par la station PANTHERE lors de l’épisode cévenol. L’analyse montre que trois systèmes orageux se sont succédé ce jour-là : Un premier sur les départements de bouche du Rhône et du Vaucluse en début d’après-midi, le second sur le département du Var en fin d’après-midi, et enfin le dernier sur l’est de Var et du département des Alpes-Maritimes en soirée. Un outil de cartographie d’anticipation des crues sera remis aux collectivités et services opérationnelle de la région de PACA pour la surveillance en temps réel de ses bassins versants en 2016 (Javelle et al., 2015). Des travaux de recherche ont été effectués afin de comprendre le comportement des bassins versants, leur réaction avec des modèles pluie-débit (type CINECAR de l’IFSTTAR) et d’établir des comparaison avec des évènements passés : les débits spécifiques de l’évènement du 03.10.2015 sur la côte d’Azur sont comparables à ceux observés pour les crues du bassin versant de l’Argens dans le Var en Juin 2010, et celles de l’automne 2014 dans l’Hérault et le Gard (Nicolas-Cabane et al., 2018).

Une alerte inondation et un plan de protection de la population, auraient pu être déclenchés juste après, mais l’ampleur de la catastrophe n’était pas prévisible selon le maire de Biot. Le bâtiment qui concentrait les systèmes d’alertes a été inondé par la rivière et il n’était plus opérationnel à partir de 22h alors qu’il était fonctionnel lors du début de la crue à 20h. Une année après l’évènement, une stratégie locale de gestion des risques inondations (SLGRI) pour le territoire à risque important d'inondation (TRI) de Nice – Cannes – Mandelieu-la Napoule a été élaboré par la directive inondation, les services de l’état et le conseil départementale des Alpes Maritimes. Elle constitue la déclinaison au niveau local des principes du plan de gestion du risque d’inondation (PGRI) établi à l’échelle du bassin Rhône-méditerranée. La stratégie locale a vocation à servir de cadre aux actions des PAPI (programmes d’actions de prévention des inondations) en cours ou à venir, celles du volet inondation des contrats de milieux (Contrat de rivière, Contrat de baie), ou des SAGE (Schéma d’aménagement et de gestion de l’Eau) (Alpes-Maritimes, 2016).

Les mesures de sécurité n’ont pas été mises en place. En effet, une étude générale d’un schéma directeur de prévention des inondations a été fait mais un bassin de rétention n’a jamais été construit, ainsi que des travaux d’étanchéité pour sécuriser les copropriétés. De son côté, la préfecture identifie de nouvelles zones rouges inondations qui viendront durcir la législation en matière de construction. Des maisons seront démolies ainsi que le siège d’une entreprise afin de libérer le site et de le transformer en un jardin ‘Parc du Pylône’: cette parcelle entièrement renaturalisée permettra d’éliminer le risque inondations tout en rendant à la Brague son côté naturel  (Jacqueline, 2021).

Le problème de fond dans cette région est une urbanisation intense au cours des dernières décennies dans les zones à risques d’inondations et le lits majeur des rivières. Les plans d’urbanisme sont conçus sans prise en compte du risque d’inondations et des autorisations de construction dans ces zones à risque sont délivrées (Viollet, 2017).

Le maire de Mandelieu a fait référence aux instructions en cas d’inondations (exemple : ne pas descendre dans les sous-sols, monter dans les étages) qui n’étaient pas respectées par les habitants. Une culture du risque émerge sans doute dans la population sinistrée, car les gens sont persuadés qu’un autre évènement similaire risque de se reproduire. Un défi particulièrement important est de développer cette culture dans les territoires exposés mais n'ayant pas subi depuis longtemps des évènements métrologiques extrêmes. Hélas, l’épisode de 3 octobre 2015 sera suivi par deux autres crues sur les bassins côtiers de la côte d’Azur (23 novembre 2019 et 1er décembre 2019) avec deux disparus, deux blessés et des centaines de foyers inondés (Brigode et al., 2021).

(Avec des contributions de Dihya Cheballah)

 

Références

Alpes-Maritimes D. des. 2016. Stratégie locale de gestion du risque d’inondation 2016-2021. Disponible sur : https://www.departement06.fr/strategie-locale-de-gestion-du-risque-d-inondation-2016-2021-14001.html (Consulté le 8 avril 2022).

Brigode P., Vigoureux S., Delestre O., Nicolle P., Payrastre O., Dreyfus R., Nomis S., et Salvan L. 2021. Inondations sur la Côte d’Azur : bilan hydro-météorologique des épisodes de 2015 et 2019. LHB, 107(1), p. 1‑14. DOI : 10.1080/27678490.2021.1976600

Jacqueline P. 2021. Durement touché par les inondations d’octobre 2015, le hameau du Pylône à Antibes définitivement détruit. Disponible sur : https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/alpes-maritimes/antibes/durement-touche-par-les-inondations-d-octobre-2015-le-hameau-du-pylone-a-antibes-definitivement-detruit-2387173.html (Consulté le 8 avril 2022).

Javelle P., Fouchier C., Saint-Martin C., Ecrepont S., Tolsa M., Cantet P., Odry J., Mériaux P., et Arnaud P. 2015. Retour sur les inondations du 03 octobre 2015 dans le Var et les Alpes-Maritimes vues par la méthode AIGA. (report). irstea Disponible sur : https://hal.inrae.fr/hal-02606084 (Consulté le 1 mars 2022).

Nicolas-Cabane C., Bourgin F., et Brigode P. 2018. Les inondations du 3 octobre 2015 sur la côte d’Azur : un évènement bref et intense ! Disponible sur : https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01954466 (Consulté le 1 mars 2022).

Viollet P.-L. 2017. Éléments de retour d’expérience des inondations du 3 octobre 2015 sur la Côte d’Azur. La Houille Blanche, 103(6), p. 87‑88. DOI : 10.1051/lhb/2017063

 

Additional Info

  • Director: Jean-Bernard Vitiello
  • Producer: F. Tisseaux, C. Espanol et P. Hubert
  • Language: French
  • Year: 2016
  • Duration (min): 52
  • Theme: Climate change, Water governance, Sustainability, Flood, Rivers, Water and community
  • Access: Free
  • Country: France
  • Technical quality (star): Technical quality (star)
  • Academic interest (star): Academic interest (star)
  • Societal interest (star): Societal interest (star)
  • Technical quality: 3
  • Academic quality: 3
  • Social interest: 4